Tout projet de construction d’une superficie supérieure à 20 m² doit faire l’objet d’une autorisation de permis de construire. Mais, celui-ci peut toutefois faire l’objet de contestations, le plus souvent de la part de riverains. Mais leur action n’est pas absolue. Pour limiter les recours abusifs, le législateur a en effet pris de nombreuses précautions. Vous souhaitez, vous aussi, contester un permis de construire ? Découvrez, avec City&You, pourquoi et comment vous y prendre ?
Pourquoi contester un permis de construire ?
La contestation d’un permis de construire est une démarche qui peut s’avérer complexe. Les motifs les plus courants sont :
- les pertes d’ensoleillement ou d’intimité (vis-à-vis trop important à cause de l’installation d’un balcon ou d’une fenêtre donnant directement sur l’habitation du plaignant, par exemple) ;
- les risques de pollution sonore, visuelle ou chimique ;
- la perte de valeur vénale du bien ;
- les risques d’inondation, d’incendie ou d’accident.
Selon le recours invoqué, ces motifs ne sont pas toujours pris en considération. Les vices de fond sont, eux, généralement imparables, mais bien plus difficiles à mettre en évidence.
En effet, si vous souhaitez faire annuler l’autorisation d’urbanisme de votre voisin, il faudra vous procurer le dossier de demande de permis de construire, déposé initialement. Ce dossier comprend différents éléments : des plans, une notice descriptive du projet, des photographies, etc.
Pour contester le permis de construire, vous allez devoir démontrer que le dossier de demande ne respecte pas les règles d’urbanisme contenues dans le plan local d’urbanisme (PLU), la carte communale, le plan d’occupation des sols (POS) ou encore le règlement national d’urbanisme (RNU).
Il faut, par ailleurs, garder en tête qu’il est très difficile de faire annuler complètement un permis de construire et que le titulaire peut déposer des demandes de permis modificatif pour se mettre en règle.
Le mécontentement des voisins vis-à-vis d’une future construction est bien souvent l’origine des recours. Mais attention à ne pas entreprendre cette démarche de manière abusive ! En effet, le détenteur du permis est désormais en droit de demander des dommages et intérêts. Pour plus de sécurité, nous vous conseillons de faire appel à un avocat.
Comment contester un permis de construire ?
Pour contester un permis de construire, deux recours sont à votre disposition.
1. Le recours gracieux administratif
Pour effectuer un recours gracieux, il faut envoyer une demande à l’autorité ayant délivré l’autorisation d’urbanisme (le maire, généralement). Le recours doit alors prendre la forme d’un courrier sur papier libre et adressé par voie postale. Nous conseillons de l’envoyer en lettre recommandée avec accusé de réception.
Dans le même temps, il faut informer le ou les titulaire(s) de l’autorisation d’urbanisme du recours porté à leur encontre par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai pour les avertir est de 15 jours francs à compter de l’envoi du recours à la mairie. Il faut alors joindre au courrier une copie intégrale de la lettre adressée au maire de la commune.
L’introduction d’un recours gracieux peut permettre d’obtenir gain de cause sans l’intervention d’un juge. Bien souvent, ce type de procédure ouvre une discussion entre les parties afin d’aboutir à une solution amiable.
Pour être valable, le recours gracieux doit présenter un certain formalisme et contenir, notamment :
- l’identité du demandeur ;
- l’identité de l’autorité ayant délivré le permis ;
- le numéro du permis de construire contesté ;
- la date de la décision ;
- l’identité du bénéficiaire du permis ;
- l’adresse du terrain du projet contesté ;
- les motifs de contestation ;
- la demande expresse de retrait du permis de construire ;
- toutes pièces permettant de justifier la demande ;
- la signature du demandeur.
L’administration dispose d’un délai de deux mois pour étudier la requête et y répondre. Si elle ne répond pas dans le délai imparti, alors on parle de rejet tacite de la demande.
Le plaignant dispose par la suite d’un délai de deux mois pour contester le permis de construire auprès d’un juge du tribunal administratif. Cette fois, il s’agit d’introduire un recours contentieux. Le délai court à compter de la notification de la décision expresse ou de la décision tacite de rejet.
Bon à savoir : Le recours hiérarchique pour contester le permis de construire ?
Il existe une autre forme de recours administratif contre le permis de construire : le recours hiérarchique. Il s’adresse au supérieur hiérarchique de l’autorité ayant pris l’arrêté. Ce type de recours n’est possible qu’à condition que le permis ait été délivré par maire au nom de l’État. Cela reste un cas exceptionnel.
2. Le recours contentieux
Le recours contentieux peut donc être adressé en première intention, dans un délai de deux mois à compter du premier jour d’affichage de l’autorisation d’urbanisme. Mais, il peut également être introduit dans un délai de deux mois après le rejet du recours gracieux. L’objectif de cette démarche est toujours d’obtenir le retrait du permis de construire pour cause d’illégalité.
Outre le formalisme, le demandeur doit également remplir les conditions de recevabilité des recours administratifs contre les permis de construire.
Là encore, le courrier adressé au tribunal administratif doit préciser clairement les raisons qui justifient la plainte. Il peut s’agir d’un vice de forme, d’un vice de procédure ou d’un vice de fond (non-respect du plan local d’urbanisme, par exemple). La demande d’annulation du permis de construire doit être clairement formulée. Elle doit être accompagnée de la décision d’urbanisme contestée.
Le ou les titulaire(s) du permis doivent être informés du recours déposé auprès du tribunal dans les 15 jours suivant son introduction. L’information est réalisée par courrier recommandé. Le maire ayant délivré l’autorisation doit également être notifié du dépôt de recours contentieux.
Enfin, le requérant doit démontrer son intérêt à agir contre la délivrance de ce permis de construire.
À la suite de ce recours, le tribunal administratif peut décider :
- de rejeter la demande d’annulation ;
- d’annuler l’autorisation d’urbanisme ;
- de suspendre l’autorisation d’urbanisme dans le cas où les travaux irréguliers peuvent être régularisés. Un délai est alors fixé pour que le titulaire fasse une demande de permis modificatif.
À noter : si le titulaire du permis de construire a déjà entamé ses travaux de construction, il est recommandé de déposer directement un recours contentieux.
Contester un permis de construire : quelles sont les conditions requises ?
Pour être recevable, une contestation de permis de construire doit remplir deux conditions.
1. Démontrer un “intérêt pour agir”
Intérêt pour agir : de quoi s’agit-il ?
On trouve cette condition à l’article L 600-1-2 du Code de l’urbanisme. Celui-ci nous indique que, pour que sa contestation soit recevable, le requérant doit pouvoir prouver que l’autorisation d’urbanisme actuelle affecte directement les conditions d’occupation, de jouissance ou d’utilisation du bien qu’il occupe ou détient.
Comment évaluer l’intérêt pour agir ?
La jurisprudence du Conseil a apporté de nombreuses précisions concernant l’intérêt à agir en matière de contentieux d’urbanisme.
Il doit tout d’abord s’apprécier au jour de l’affichage du permis de construire. Les circonstances postérieures n’ont pas à être prises en considération par le juge.
Il n’existe pas, par principe, de présomption d’intérêt à agir pour les voisins d’une construction. Ces derniers doivent ainsi démontrer le préjudice causé par le permis de construire. Dans un arrêt du 10 juin 2015, la haute cour administrative a ainsi affirmé qu’un « demandeur devait toujours apporter des éléments précis et étayés de nature à établir l’atteinte susceptible d’affecter les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien. » Elle ajoute, dans un arrêt de 2016, que « la seule mitoyenneté ou la co-visibilité avec le projet de construction ne suffit pas à justifier un intérêt à agir. »
Dans un arrêt du 13 avril 2016, le Conseil d’État a toutefois assoupli sa position en admettant l’intérêt à agir des voisins. Ces derniers ne sont néanmoins pas dispensés d’apporter des éléments suffisants pour démontrer un trouble à la jouissance paisible de leur bien.
Au regard de cette jurisprudence, il convient de rester prudent. Les recours abusifs peuvent donner lieu à des sanctions sous forme de dommages et intérêts. Ce type de demandes sont généralement accordées lorsque le juge considère que la démarche du requérant traduit un comportement abusif de sa part et cause un préjudice excessif au titulaire du permis. La loi Élan du 23 novembre 2018 facilite d’ailleurs ces actions. Il convient donc d’être prudent et de ne pas déposer de recours sans cause sérieuse.
2. Respecter le délai de recours
Pour remplir cette condition, le requérant dispose d’un délai de deux mois à compter du premier jour d’affichage de l’autorisation d’urbanisme. Si vous ne connaissez pas la date d’affichage de l’autorisation, fiez-vous à sa date de délivrance.
Si les informations mentionnées sur le panneau d’affichage sont erronées (superficie, hauteur de la construction, etc.), vous pouvez alors contester l’autorisation au-delà du délai de deux mois.
Par ailleurs, sans affichage d’une autorisation d’urbanisme, le délai de contestation est de six mois à compter de l’achèvement des travaux.
Comment contester un permis de construire en pratique ?
Voyons maintenant comment ce recours est concrètement mis en œuvre. Il comprend deux grandes étapes.
Vérifier les conditions de recevabilité du recours
C’est une étape indispensable pour éviter des dommages et intérêts. Délai, intérêt à agir, le demandeur doit s’assurer que toutes les conditions sont bien remplies.
En pratique, si vous êtes des voisins immédiats, vous avez de grandes chances de voir votre intérêt à agir reconnu par le tribunal administratif. Mais cela ne suffit pas. Il est en effet indispensable d’apporter des éléments pour le démontrer. Plus le terrain est éloigné de la construction, plus les preuves devront être solides. Perte d’ensoleillement, nuisances olfactives ou sonores n’hésitez pas à les faire constater par un huissier de justice, des photographies, des rapports ou encore des attestations. Dans le cas contraire, votre recours sera déclaré comme irrecevable par le Tribunal administratif. Le fond de votre contestation ne sera donc pas étudié.
Établir les motifs de la contestation du permis de construire
La seconde étape consiste à déterminer les motifs de la contestation du permis de construire. Le juge du tribunal administratif a uniquement le pouvoir d’annuler l’autorisation d’urbanisme pour cause d’illégalité externe ou interne.
Les moyens de légalité externe
Ils sont au nombre de trois :
- vice de procédure : la commune n’a pas suivi la procédure prévue par le Code de l’urbanisme pour la délivrance de l’autorisation de construire ;
- vice de forme : le permis de construire ne contient pas les motivations nécessaires ou une mention essentielle ;
- incompétence du signataire du permis de construire : la personne ayant apposé sa signature n’avait pas la compétence pour le faire.
Une illégalité externe n’est pas toujours synonyme d’annulation de permis. Certains éléments illégaux sont régularisables. Le juge administratif peut donc tout simplement suspendre l’autorisation d’urbanisme en attendant de nouvelles mesures visant à rectifier l’illégalité. Par ailleurs, pour qu’une illégalité externe provoque un retrait de permis, celle-ci doit être de nature à avoir influencé la décision de la commune.
Les motifs d’illégalité interne
Ces motifs peuvent être détectés par votre avocat. Il peut tout d’abord s’agir de la violation de la loi. Le PLU ou le Code de l’urbanisme, par exemple, n’ont pas été respectés.
L’erreur de droit est également un motif d’illégalité interne. Pour faire simple, la commune s’est appuyée sur la mauvaise règle juridique pour octroyer le permis de construire. La loi peut avoir été mal interprétée. Le texte utilisé peut également avoir été abrogé ou, au contraire, ne pas encore être entré en vigueur.
D’autre part, il est possible de contester un permis de construire en soulevant l’illégalité d’une des règles d’urbanisme ayant permis sa délivrance. On parle alors d’exception d’illégalité.
De la même façon, le détournement de pouvoir est un motif pouvant être invoqué par le demandeur. Il s’applique lorsque le permis a été délivré à des fins privées. Ce motif est peu utilisé en pratique, sa matérialité étant difficile à démontrer.
Enfin, votre recours peut se fonder sur une erreur de fait. La commune a ainsi pris sa décision sur base d’une mauvaise interprétation de la situation.
Dans tous les cas, un motif d’illégalité interne n’entraîne le retrait total du permis de construire qu’à condition que celui-ci remette en cause la nature du projet. Une annulation partielle ou temporaire, en attendant une régularisation, est possible.
Les contestations de permis de construire ne sont pas rares et peuvent remettre en question votre projet. Chez City&You, nous accompagnons les propriétaires souhaitant vendre leur terrain à un promoteur immobilier. En anticipant en amont les points de vigilance, nous cherchons à sécuriser vos projets immobiliers. N’hésitez pas à solliciter nos experts !
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