En matière de bail commercial, il existe un certain nombre de protections apportées au locataire par le législateur. En effet, celui-ci a le droit au renouvellement du bail… et le bailleur ne peut pas lui refuser! À moins de devoir pour ce dernier régler une indemnité d’éviction. Intéressons-nous à cette indemnité, en détaillant les cas pour lesquels elle est exigible et son montant.
Définition de l’indemnité d’éviction
L’article L145-14 du Code de commerce précise ce qu’est l’indemnité d’éviction et en propose une définition. « Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-14 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d’éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement ».
Cela signifie qu’au terme du contrat de location, un bailleur ne peut pas refuser la demande de renouvellement d’un locataire, sauf en lui payant une indemnité. Il s’agit d’un droit au dédommagement. Le fait de ne plus pouvoir jouir du bien est, pour le preneur, un préjudice. Le droit d’exploitation sur le bail commercial dont il faisait l’usage n’est plus possible.
À savoir : si le bailleur peut proposer une indemnité d’éviction, ce n’est pas obligatoire. C’est au locataire de réclamer cette indemnité suite au congé. Pour cela, il dispose d’une période de deux ans pour demander cette indemnité d’éviction en proposant un montant cohérent (lire ci-après « Le montant de l’indemnité d’éviction d’un bail commercial »). Ce délai court à compter de la notification du congé du bailleur ou de la réception du refus de renouvellement du bail.
Les cas qui justifient le versement d’une indemnité d’éviction
La rupture d’un bail commercial ne donne pas systématiquement lieu au versement de cette indemnité. En effet, pour qu’elle puisse exister, le locataire en place doit exercer son droit au renouvellement au maximum six mois avant le terme du contrat. Dès lors, le bailleur a deux solutions.
- S’il souhaite conserver le preneur et son entreprise en place, il peut lui notifier une réponse positive et renégocier avec lui les termes de l’accord (comme le montant du loyer) ;
- Deuxième possibilité, et c’est celle qui nous intéresse aujourd’hui, le bailleur peut refuser le droit au renouvellement : il évince le preneur en lui donnant congé et effectue le paiement d’une indemnité d’éviction, en guise de compensation.
Attention, le montant de l’indemnité d’éviction ne dépend pas du bon vouloir du propriétaire bailleur. En effet, son montant est complexe, souvent l’occasion de vives discussions entre les parties.
Les cas dans lesquels le bailleur peut émettre un refus d’indemnité d’éviction
En vertu de l’article L145-17 du Code de commerce, le bailleur, même s’il évince son locataire, est parfois exempté d’indemnité d’éviction. Dans les cas suivants, le locataire n’a ainsi pas le droit à une indemnité malgré son congé :
- Lorsque le bail commercial est de courte durée, c’est-à-dire de 36 mois maximum, renouvellements inclus ;
- Le non-renouvellement du bail s’appuie sur un motif légitime et sérieux : le propriétaire fait face à des impayés de loyer (ou de charges) ou bien l’exploitation du preneur ne remplit plus les conditions nécessaires pour bénéficier d’un bail commercial ;
- L’immeuble se trouve dans un état d’insalubrité et est voué à la démolition ou ne peut plus être occupé car il est trop dangereux. Dans ce cas de figure, si le bailleur fait rénover ou reconstruire l’immeuble, l’entreprise dispose alors d’un droit de location prioritaire une fois les travaux terminés.
Le refus de renouvellement du bail sans indemnité d’éviction fait l’objet de très nombreux contentieux juridiques. Régulièrement, la Cour de cassation a tranché des questions relatives aux droits du locataire commercial.
Comment calculer l’indemnité d’éviction d’un bail commercial ?
Son montant varie si le fonds de commerce est transférable ou non. Dans tous les cas, des indemnités accessoires peuvent être versées à l’entreprise par le bailleur en fonction des circonstances.
L’indemnité d’éviction en cas de perte de fonds de commerce
Le transfert est impossible. Le locataire exerce, par exemple, ses activités à Paris, dans un secteur où aucun autre local n’est disponible. Dans ce cas de figure, il a le droit à une indemnité de remplacement. Son montant correspond à la valeur du fonds de commerce de l’entreprise. Celle-ci doit être évaluée en fonction des usages de la profession sur base :
- Des bénéfices annuels moyens de son exploitation ;
- Du chiffre d’affaires annuel ;
- Des recettes journalières ;
- Du prix d’acquisition, c’est-à-dire du pas-de-porte, si le fonds de commerce est récent.
L’indemnité d’éviction en cas de transfert de fonds de commerce
Ici, pas de remplacement. Le transfert du fonds de commerce ne pose pas de difficultés majeures. Dans ce cas de figure, le paiement d’une indemnité de déplacement ou de réinstallation au preneur est obligatoire. Celui-ci peut déplacer son activité à proximité, sans perte de clientèle. La plupart du temps, pour calculer l’indemnité, il suffit de faire la différence entre le montant du loyer en cas de renouvellement et le montant du loyer du nouveau local. D’autres éléments peuvent être pris en compte comme par exemple la qualité de l’emplacement ou le temps nécessaire à la réinstallation.
Les indemnités accessoires
L’indemnité principale peut être majorée de différents frais comme par exemple :
- Des frais de réinstallation dans les nouveaux locaux commerciaux ;
- D’une indemnité visant à compenser la perte de chiffre d’affaires pendant le déménagement de son activité et du local ;
- Des indemnités de licenciement des salariés exerçant leurs activités dans les lieux ;
- D’une indemnité de perte de logement en cas de bail mixte : le local sert à la fois de résidence principale et de lieu de son activité professionnelle ;
- Etc.
En additionnant tous ces frais, la facture pour cette indemnité d’éviction grimpe.
Bon à savoir : quelle date prendre en compte pour l’évaluation de l’indemnité de remplacement ou de déplacement ?
Le préjudice du preneur au jour de son départ effectif des lieux ou à la date de la décision du juge.
Qui détermine le montant de l’indemnité d’éviction ?
L’évaluation de l’indemnité de remplacement ou de déplacement n’est pas évidente et peut entraîner des conflits. La meilleure solution est de fixer le montant de l’indemnité d’éviction à l’amiable, en trouvant un terrain d’entente entre bailleur et preneur. Pour cela, il est souvent utile de faire appel à un expert juridique. En cas de désaccord sur le calcul, il est possible pour l’une des parties de saisir le tribunal pour demander une évaluation judiciaire du montant de l’indemnité de bail commercial. Le recours à un avocat est nécessaire pour prendre en charge ce litige juridique et faire valoir ses droits.
Quand verser l’indemnité d’éviction des locaux à son locataire ?
Suite à l’évaluation, le bailleur dispose d’un délai de quinze jours pour se rétracter et décider de renouveler le bail en lieu et place de l’indemnité d’éviction. Passé ce délai, il n’a plus le choix. Il a trois mois à compter de la signification d’un commandement de payer délivré par un huissier de justice, pour régler la somme.
Une fois le paiement de l’indemnité d’éviction au locataire effectué, ce dernier doit quitter les locaux commerciaux dans un délai de trois mois maximum. La Cour de cassation a maintes fois rappelé que le locataire est autorisé à rester dans les lieux jusqu’au paiement de ladite indemnité. Il bénéficie d’un droit au maintien dans les locaux dans les conditions de son bail.
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